Affaire Tamai : ils réclament justice !

Huit mois après les faits, de plus en plus de voix se font entendre chez les proches et au sein de la famille indépendantiste pour réclamer justice quant à la mort tragique de Guy Tamai, tué le 5 juin 2014. Le meurtrier présumé, identifié, est lui toujours libre.

Ce fut le drame de trop. Au matin du 14 janvier dernier, les proches de Guy, l’ancien secrétaire général de l’UPM, apprenaient le décès de son fils, âgé de 22 ans. Profondément marqué par la disparition de son père, Mike Tamai un jeune homme très apprécié par ses collègues policiers et papa d’une petite fille de sept mois, s’est en effet donné la mort il y a quelques jours après s’être recueilli une dernière fois sur la tombe de son père. A la suite de cette tragédie, et pour la première fois sur les groupes où débattent les militants indépendantistes, plusieurs d’entre eux se sont interrogés quant à savoir où en était l’enquête sur la mort de Guy Tamai. Une disparition que le président de l’UPM avait qualifiée au journal télévisé comme n’étant rien de moins qu’un « assassinat ».

En effet, le 5 juin 2014, après l’élection au congrès de l’exécutif Ligeard, plusieurs responsables politiques – dont des membres du gouvernement – s’étaient donnés rendez-vous pour une après-midi et une soirée de « libation » dans un restaurant des Baies de Nouméa. Après une soirée de beuverie et une rixe particulièrement violente, le corps de Guy Tamai, collaborateur de l’UPM, avait été retrouvé inanimé sur le trottoir de la rue Jules Garnier. L’autopsie s’était montrée formelle : l’ancien élu était bien décédé des suites de coups violents qu’il avait reçu à la tête et au thorax. Quelques jours plus tard, la Procureur de la République annonçait que le membre du gouvernement Anthony Lecren était bien sur les lieux lors des faits en « état d’ébriété avancé » et qu’il avait raccompagné ce soir-là en voiture (jusqu’au congrès de la Nouvelle-Calédonie) Seleone Tuulaki, un autre militant indépendantiste*. Celui-ci avait dès le lendemain été mis en examen pour violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner.

(* Seleone Tuulaki était 25ème sur la liste indépendantiste conduite par Roch Wamytan lors des élections provinciales de mai 2014)

La Procureur voulait la détention

Claire Lanet, Procureur de la République, avait demandé au nom du parquet la détention du meurtrier présumé. Cependant, le 12 juin, le juge des libertés avait refusé d’envoyer Seleone Tuulaki en prison et avait préféré le placer sous contrôle judiciaire. Une décision contestée qui aura depuis fait couler beaucoup d’encre dans la presse et qui aura agité le microcosme politique mais aussi l’opinion publique. Car depuis lors Seleone Tuulaki, membre du RDO (parti politique des Wallisiens et Futuniens indépendantistes) a obtenu un poste de collaborateur au sein des institutions. Très « visible » et volontiers véhément, il utilise une importante partie de son temps à diffuser sur les réseaux sociaux à l’aide de son nom propre ou de plusieurs pseudos (Karl Poendi, John Lax, etc…) l’actualité de l’Union Calédonienne ou du RDO pour lequel il occupe le poste officiel « d’administrateur » (Cf. Site du RDO) Il répond également parfois violement ou de façon grossière à ses contradicteurs. Une attitude et un comportement qui ne manquent pas de créer un profond malaise chez les militants indépendantistes qui préféreraient le voir faire « profil-bas » et qui aujourd’hui réclament des explications :

Disparitions troublantes et lunettes noires

Il faut dire également que la famille Tamai a été plusieurs fois endeuillée depuis la disparition de l’ex-élu. C’est une information que nul n’a encore communiqué, mais dans des circonstances qui restent encore à éclaircir, quelques jours après avoir échangé avec Seleone Tuulaki, Jean-Claude Tamai, un autre membre de la famille, est en effet décédé à la fin du mois d’octobre 2014. Selon une source très proche de la victime, les deux hommes se seraient au début du mois d’octobre « copieusement engueulés » dans des messages mails et via leurs comptes Facebook. Jean-Claude Tamai essayant d’obtenir de Seleone Tuulaki la vérité sur les circonstances entourant la mort de son neveu. Selon la personne qui a conservé ces échanges et qui en a communiqué une partie à Calédosphère, ces derniers expliqueraient que Guy Tamai pourrait avoir été frappé par plusieurs personnes au soir du 5 juin. Ajouté au récent suicide de son fils, ces drames qui touchent la même famille en l’espace de seulement six mois laissent les observateurs du dossier circonspects, pour ne pas dire soupçonneux.

Du côté des leaders de l’UC, certains sont en tout cas sur la sellette. Il y a une dizaine de jours un élu bien connu de l’Union Calédonienne s’est ainsi présenté dans les locaux du gouvernement avec des lunettes de soleil. Or, devant deux membres du gouvernement qui, curieux, lui ont demandé pourquoi il ne les ôtait pas à l’intérieur du bâtiment, l’élu leur aurait répondu un peu gêné qu’il s’était fait « bastonner » par plusieurs militants indépendantistes et qu’il ne tenait pas à montrer les traces de coups. Si, naturellement, aucun lien direct ne peut être fait entre ces agresseurs et « l’affaire Tamai », les deux évènements – le suicide du jeune homme et l’agression – semblent totalement concomitants. Se pourrait-il que certains proches de Guy Tamai aient voulu donner une leçon à celui qu’ils prennent pour l’un des responsables de la mort de leur ami ? C’est en tout cas à l’heure actuelle une question qui agite le microcosme de la rue des Artillerie.

Reste que le meurtrier présumé est lui toujours « libre », qu’il continue à s’exprimer quotidiennement sur les réseaux sociaux – comme si de rien n’était – et qu’aucune nouvelle d’un procès n’a encore été officiellement annoncée. Une absence et un silence de l’institution judiciaire qui interpelle de plus en plus et qui pourrait, si rien ne se passe, créé encore davantage de remous. Rappelons enfin que le fait pour une personne de commettre des actes ou de tenir des paroles déplacées pouvant nuire à la quiétude des autres citoyens ou attenter à la paix publique peut être apparenté à un trouble de l’ordre public.