Pouvoir, Coutume et Franc-maçonnerie

Depuis le milieu de semaine, sur les réseaux sociaux, le président du sénat coutumier est accusé par des militants de l’UC d’appartenir à la franc-maçonnerie. Ses proches s’en défendent et montent au créneau. Tous des frères ?

L’un des militants de l’UC les plus actifs sur la toile a informé les internautes que Jean Kays, l’actuel président du sénat coutumier, avait reçu en cadeau la médaille du Grand Orient de France(G.O.D.F), l’une des plus anciennes obédiences maçonniques de France. Les statuts sont écrits de manière à faire croire que le nouveau président du sénat serait un « frère » et appartiendrait donc à la franc-maçonnerie. Très clairement, il s’agit là d’une façon insidieuse pour les adversaires du président de l’institution de mettre en cause son attachement à la cause indépendantiste et au combat politique mené par l’Union Calédonienne.

Depuis lors, les échanges sont vifs entre les militants indépendantistes, lesquels reprochent une attaque gratuite contre « le président de la seconde institution du pays » et mettent aussi en doute la véracité de cette information. Certains se perdant en conjoncture et se demandant même si la franc-maçonnerie locale aurait eu un rôle dans l’élaboration de la charte du peuple Kanak…

Une médaille pour un rendez-vous

En fait, d’après nos informations, Jean Kays aurait bien reçu une médaille à l’effigie du logo du Grand Orient de France de la part justement du Grand Maître de l’obédience (c’est-à-dire celui qui la dirige). Mais ce « cadeau » serait en fait « habituel et anodin » lorsqu’un président d’institution ou un chef d’Etat rencontre les dirigeants d’une obédience maçonnique. Selon un proche du président du sénat, Jean Kays aurait en effet été sollicité comme tous les autres présidents des institutions du territoire lors de la venue en novembre dernier de Daniel Keller, le Grand Maître du G.O.D.F. Jean Kays aurait accepté de le recevoir et un rendez-vous a donc été organisé au sénat coutumier pour évoquer le rôle de l’institution et ses spécificités. Du côté de Nouville on insiste sur le fait que Daniel Keller a échangé avec les principaux leaders de Nouvelle-Calédonie et on rappelle « qu’on ne devient pas franc-maçon parce qu’on parle à l’un d’entre eux 20 minutes »

Un autre comité

Venu pour participer aux « journées maçonniques interobédientielles », Daniel Keller avait présenté une proposition sortie des loges locales à savoir la création d’un comité Vérité – Réconciliation. Dans un communiqué officiel le G.O.D.F expliquait :

Celui-ci pourrait être un accélérateur de dialogue en perspective de la période référendaire qui va s’ouvrir en application de l’accord de Nouméa. Cette réflexion exprimée par les Francs-Maçons de plusieurs obédiences traduit la volonté d’œuvrer durablement à la construction du destin commun (Communiqué du G.O.D.F du 12/11/2014)

Le Grand Maître affirmant ensuite que les divers entretiens qu’il avait eus « avec la Présidente du Gouvernement, le Haut-Commissaire de la République et le Président du Sénat coutumier confortent le sentiment qu’un tel dialogue est nécessaire ». On peut donc supposer que chacun de ses interlocuteurs a reçu en remerciement une médaille à l’ordre du G.O.D.F. Quoi qu’il en soit, il est très rare que des militants indépendantistes s’attaquent ainsi personnellement à un président du sénat coutumier et remette en cause ses convictions profondes. Preuve de plus des fractures existantes au sein du monde indépendantiste ou réelle volonté de nuire ?