Nouméa-Bagdad

Si la Nouvelle-Calédonie est toute entière frappée par l’augmentation de la délinquance, c’est Nouméa qui attire l’attention. Si jusqu’à ces dernières années, la délinquance était circonscrite à certains quartiers, elle déborde maintenant partout et les Nouméens ne se sentent plus en sécurité nulle part.

Il devient sacrément dangereux d’aller voir un verre le vendredi ou le samedi soir sur la Baie des Citrons ou l’Anse-Vata et il est fortement déconseillé d’aller faire son jogging dans ces mêmes endroits trop tôt dans la journée pendant le week-end. Et ce ne sont là que quelques exemples, car les cambriolages ou les homes-jackings se sont multipliés dans tous les quartiers de la ville. À croire qu’en ville, on vive dans Bagdad-City !

Aveu d’impuissance

La question du retour à la sécurité a été de la part de tous les candidats, le moteur de la campagne municipale de mars 2014. Les uns et les autres convenant que la situation, déjà fortement détériorée, ne pouvait se prolonger. Deux ans plus tard, force est de constater que non seulement ça ne s’est pas arrangé, bien au contraire. La mairie semble avoir fait le deuil de son plan Marshall pour la sécurité, dressant même un constat d’impuissance face à la dégradation de la situation

« Quand vous avez 200 personnes, individus, avinés, cannabisés, qui veulent en découdre, qui esquintent les voitures au passage, qui se battent entre eux, je me demande où, comment on peut faire respecter l’ordre public ? » (Sonia Lagarde, RRB 1er avril)

Mettre la police dans la rue, comme Sonia Lagarde s’y était engagée pendant la campagne, ne se révèle pas aussi simple que ça. Gangrénée par des luttes intestines et syndicales pendant des années, la police municipale de Nouméa a perdu de son efficacité. De plus, une présence sur le terrain réclame des effectifs et à l’évidence, la mairie de Nouméa n’a pas les moyens d’y parvenir

« J’ai des brigades qui sont sur le terrain, qui représentent à peu près 30 à 40 personnes. Je ne peux pas faire mieux avec cette police municipale » (Sonia Lagarde, RRB 1er avril)

Dans les faits, il n’y a pas plus de policiers municipaux sur le terrain maintenant qu’hier, alors que la délinquance atteint des pics inquiétants.

Armer les policiers ?

La députée-maire de Nouméa mise maintenant sur « l’armement » des policiers. Étant intervenue à l’Assemblée en ce sens, les policiers municipaux vont bénéficier d’équipements spécifiques, ainsi les Flashballs et les tasers. Mais le décret d’application tarde à être signé à Paris, ce que déplore Sonia Lagarde

« On ne peut pas, tout seuls, avec notre police municipale, qui en plus est fortement démunie, je le rappelle, parce que la police municipale, elle est munie que de tonfas, de bâtons, alors, comment vous voulez faire ? » (Sonia Lagarde, RRB 1er avril)

Il ne faut pas croire cependant que l’usage de ces équipements, strict et très réglementé, sera de nature à réduire les agressions, les vols, les bagarres à la sortie des établissements scolaires ou des boites de nuit. On se doute en revanche que c’est dans l’application d’une nouvelle stratégie de l’usage des forces, que peut venir l’espoir d’une stabilisation de la situation. Cela passe par une meilleure coordination des polices nationales et municipales, l’implication de la justice dans la répression et l’abandon provisoire de certaines missions au profit d’une lutte efficace et entière contre la délinquance.