Alcool : la FINC ment et se fait ramasser par les internautes

Afin d’éviter le vote de mesures coercitives sur la vente d’alcool, la FINC a fait réaliser une vidéo promotionnelle censée expliquer à l’opinion qu’il n’y a pas de consommation excessive d’alcool en Nouvelle-Calédonie… Elle l’a fait notamment à la demande de la société GBNC, entreprise productrice de boissons alcoolisées et adhérente de l’organisation. Gerbant.

Le clip promotionnel fait 2 minutes et 20 secondes. Dans cet espace, la Fédération des Industries de Nouvelle-Calédonie explique que « s’il est vrai qu’il existe des problèmes liés à l’alcool », en revanche, « il existe aussi beaucoup de fausses vérités qui circulent ». Et la litanie de mensonges que le clip expose ensuite ne semble pas avoir de limite. L’objectif sous-jacent de cette campagne ? Faire pression sur les élus et empêcher le vote de prochaines mesures contraignantes par le congrès visant à faire diminuer les ventes d’alcool. Et pour se faire, il semble que tous les moyens soient bons, quitte à ce que l’organisation patronale prenne quelques libertés avec la réalité et les données des institutions sanitaires. Ainsi, la FINC prétend par exemple au travers de cette vidéo qu’avec une consommation annuelle de 9 litres d’alcool par habitant en 1998 et de 9.8L en 2015, la consommation n’aurait pas (vraiment) augmenté sur le territoire. Mais c’est parfaitement faux. En effet, le rapport sanitaire de l’Agence Sanitaire et Sociale (ASS) (Cf. page 4 ci-dessous) démontre que la consommation d’alcool est passée de 1.300.000 litres en 1995 à 1.920.611 litres en 2013. Naturellement, en ramenant ce chiffre au nombre d’habitants, la FINC réussit un tour de passe-passe servant ses intérêts. D’autant plus que dans cette méthode de calcul, l’ensemble des mineurs et des enfants sont pris en compte (même les bébés qui ne sont pourtant pas réputés pour mettre de la Bière dans leur biberon)

Ben si, on picole plus que les autres !

Dans un second temps, toujours pour prouver qu’il n’y a pas vraiment de problème avec l’alcool en Nouvelle-Calédonie, la FINC déclare « on ne boit pas plus d’alcool en Nouvelle-Calédonie qu’ailleurs » en faisant un comparatif avec quatre pays : les Pays-Bas, la Nouvelle-Zélande, l’Espagne et la France qui ont tous une consommation supérieure à 10L/an. Or, cette sentence est, elle aussi, parfaitement fausse. Dans son rapport de 2014, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a présenté les consommations mondiales d’alcool dans plus de 160 pays. Ce classement, à l’époque repris par de nombreux sites internet, démontre que si la Nouvelle-Calédonie était considéré comme un pays à part entière, elle se situerait à la 27ème place, juste derrière…. la Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas ou justement l’Espagne mais devant les Etats-Unis, le Canada, le Brésil, le Japon, Cuba ou encore la Côte d’Ivoire. En fait, la Nouvelle-Calédonie serait dans ce cas classée 27ème sur 193, c’est-à-dire parmi les 13% de pays qui consomment le plus de boissons alcoolisées sur la planète. Autant dire que 87% de la population de la planète consomme proportionnellement moins d’alcool que les Calédoniens. Ce qui n’empêche pas la FINC de déclamer « qu’on ne boit pas plus d’alcool qu’ailleurs en Nouvelle-Calédonie » (takacroaaar). Pour répondre aux sollicitations sonnantes et trébuchantes de la GBNC (qui fabrique la bière locale), la FINC assure pareillement « qu’en Nouvelle-Calédonie, on ne boit pas trop de bière », toujours en faisant un comparatif avec quatre pays dont la consommation est (évidemment) supérieure à celle sur le territoire. Manque de bol, là aussi, c’est un grossier mensonge. En effet, toujours selon le classement de l’OMS, la Nouvelle-Calédonie se situerait à la 52ème place du classement mondial. Il y a donc 140 pays dans le monde où on boit moins de bière que sur le caillou.

La FINC ne veut pas de restriction d’alcool

Continuant sur sa lancée comme si de rien n’était, la FINC en vient ensuite à son objectif et déclare que « le vrai problème c’est donc la consommation nocive et le comportement irresponsable d’une minorité ». Et pour lutter contre cette « minorité », la FINC a ses solutions. Car tout de go, l’organisation qui regroupe les industries de Nouvelle-Calédonie affirme que « les mesures actuelles ne semblent pas avoir résolues le cœur du problème ». Comprenez : les taxes et les interdictions de ventes d’alcool. La FINC en vient même à expliquer que ces mesures entrainent de la violence (pourquoi ? On ne sait pas). En fait, le message de l’organisation patronale est clair :

« A la FINC, nous pensons que davantage de restrictions sur l’alcool n’est pas la solution et pourrait avoir de lourdes conséquences sur l’économie locale (FINC, clip promotionnel pour l’alcool) »

Autrement dit, la FINC effectue un chantage à l’emploi à destination des élus et de l’opinion publique : s’il y avait une augmentation des taxes sur les boissons alcoolisées ou s’il y avait des restrictions sur la vente d’alcool, les entreprises GBNC ou Le Froid licencieraient leurs salariés. Et toc !

La FINC produit les causes, mais c’est vous qui payez les conséquences !

Car, s’agissant des solutions, la FINC en a tout un tas. Leur point commun ? Ça ne la concerne pas et encore moins la GBNC qui fabrique l’alcool. La FINC propose ainsi pour lutter contre les effets de l’alcool de « multiplier les contrôles sur les routes et la répression » (ça c’est l’Etat qui paie donc c’est pas la FINC). Elle propose aussi de « renforcer la prévention et l’éducation » (ça c’est l’éducation nationale, les parents et les associations, donc c’est pas la FINC) et enfin de taxer (peut-être) mais alors tout doucement et… pas maintenant :

« Plutôt qu’une forte taxe soudaine, mieux vaut adapter une taxation progressive, échelonnée dans le temps (FINC, clip promotionnel pour l’alcool) »

Car, dit-elle, « des emplois et des familles sont menacés »… La vidéo déjà vue plus de 50.000 fois sur les réseaux sociaux n’a pas manqué de faire réagir les internautes. Il faut dire –même si cela ne fera pas plaisir à la FINC – que les chiffres sont tenaces et la réalité prégnante : l’alcool est un véritable fléau en Nouvelle-Calédonie. Dans son rapport daté de décembre 2015, l’Agence Sanitaire et Sociale (ASS) a effectué le constat suivant :

• 51% des accidents mortels sont provoqués par une alcoolisation au volant ;
• 80% des personnes incarcérées au Camp Est le sont pour des faits commis sous l’emprise de l’alcool ;
• 11% des décès enregistrés sur le Caillou sont dus à l’alcool (soit plus du double de la moyenne mondiale qui est de 4%) ;
• Plus d’un Calédonien sur quatre a une consommation nocive responsable de complications sociales ou sanitaires ;
• 52% des jeunes interrogés déclarent avoir été saouls au cours des 30 derniers jours… etc…

“Faut arrêter de prendre les gens pour des steaks “

Une situation connue par l’ensemble des Calédoniens qui n’ont visiblement que modérément apprécié cette publicité déguisée visant à protéger les intérêts financiers des entreprises productrices d’alcool. En effet, des centaines de commentaires dénoncent une pub déguisée visant à reporter la responsabilité sur tout le monde… sauf les entreprises importatrices et productrices d’alcool.

Pour Patrick, il est ainsi « honteux » de faire du chantage à l’emploi et surtout de se « donner bonne conscience » :

Des propos qualifiés « de prétextes exécrables » par Catherine qui se moque de l’irresponsabilité de de la société Le Froid et de la GBNC laquelle est d’ailleurs partenaire commerciale de la société Heineken :

Enfin, de nombreux internautes ont mis doute les chiffres présentés par la FINC en les comparant à ceux des centres sociaux. De quoi faire réagir également le président de l’association pour la sécurité routière, Gilles Palix, qui oppose les (faux) chiffres de la FINC avec ceux de la gendarmerie, de la police et du pôle Santé.

En définitive, cette vidéo promotionnelle aura surtout promue auprès des internautes l’irresponsabilité de la FINC et de ses dirigeants, plus intéressés semble-t-il par les donations des entreprises adhérentes que par la santé publique. Des sociétés qui effectuent depuis des années de confortables bénéfices au travers de la vente d’alcool (qui progresse d’ailleurs constamment). Mais que celui qui n’a jamais récolté un bad-Buzz leur jette la première bière…