Nouméa : Sonia Lagarde échoue à faire voter son budget

Pour la première fois depuis 130 ans, le maire de Nouméa a retiré son budget de l’ordre du jour du conseil municipal. Face aux amendements non-traités en amont et à des demandes de l’opposition non-satisfaites, Sonia Lagarde a préféré éviter de se placer en minorité. Nouméa est sans budget.

Dans un communiqué, le Mouvement Populaire Calédonien (MPC) de Gaël Yanno estime avoir eu affaire ce mercredi à un « véritable déni de démocratie » qui ne s’était jamais produit « en plus de 130 ans de conseil municipal à Nouméa ». En effet, lors de la séance du conseil municipal du 21 février au cours de laquelle était censée être voter le budget de la commune, Sonia Lagarde a décidé lors des débats de finalement retirer l’examen du budget. En cause selon l’ex-députée : des amendements déposés par les groupes Calédonie Ensemble et MPC, mais aussi par elle-même puisque la maire de Nouméa a souhaité au dernier moment proposer l’augmentation du nombre de caméras de surveillance gérées par la municipalité. De son côté, le groupe de Gaël Yanno avait demandé sans succès une augmentation du budget anti-tags qui prolifèrent dans de nombreux quartiers de la ville et les membres du groupe Calédonie Ensemble ont, eux, proposé des investissements dits « de rééquilibrage » vers les quartiers centre et nord de la commune. Car si des aménagements importants ont déjà été entrepris dans les quartiers sud de Nouméa, notamment avec l’embellissement des baies, le groupe dirigé par Dominique Simonet a rappelé, qu’en 2014, dans le programme de Sonia Lagarde, figurait l’engagement d’investir dans les autres quartiers. A savoir l’aménagement du cœur de quartier de Rivière Salée, du littoral de Tindu-Kaméré, des équipements publics pour le quartier de Magenta et de Portes de Fer et enfin la rénovation de la plage de Magenta. Des travaux qui restent pour l’heure à l’état de promesse.

Délinquance : le silence de la maire de Nouméa

En définitive, face aux nombreux actes de délinquance qui ont émaillé l’actualité de ce début d’année et qui ont majoritairement eu lieu à Nouméa, Sonia Lagarde a sorti deux amendements que son équipe n’avaient pas encore inscrits dans son budget 2018 : d’abord l’augmentation du budget dévolu à la lutte anti-tags. Gaël Yanno demandait 20 millions de francs, Sonia Lagarde a elle demandé dix millions de plus. Ensuite l’augmentation du nombre de caméras qui passeraient de 85 actuellement à 120. Une position étrange de la part de la maire puisque lorsqu’elle était dans l’opposition face à Gaël Yanno, elle expliquait que le nombre de caméras de surveillance n’était pas la solution, celle-ci reposant essentiellement sur la présence policière dans les rues. Ainsi, face à Gaël Yanno, lors du débat électoral organisé par les Nouvelles calédoniennes durant la campagne, Sonia Lagarde s’était montrée opposer à la proposition de l’ancien 1er adjoint au maire qui souhaitait augmenter la vidéo-surveillance :

« On peut mettre toutes les caméras de surveillance que l’on veut dans la ville, mais ça ne remplace pas la présence policière sur le terrain : jusqu’à ces derniers temps, il n’y en avait guère qu’une dizaine dans les rues. Les caméras de surveillance, c’est bien, mais elles doivent permettre à des policiers d’intervenir immédiatement, et pas d’attraper les fautifs le lendemain (Sonia LAGARDE, 27/03/2014 ; sources : LNC)

Un changement de position qui marque en vérité une certaine impuissance de la municipalité à endiguer les nombreux actes de délinquance constatés et qui explique peut-être le silence de Sonia Lagarde sur le sujet. En effet, selon la loi et les compétences dévolues aux maires, ceux-ci représentent « l’autorité de police administrative au nom de la commune. Ils possèdent des pouvoirs de police générale leur permettant de mener des missions de sécurité, de tranquillité et de salubrité publiques ». Tenus de « mettre en œuvre les moyens normatifs et matériels nécessaires. Les maires peuvent, notamment, décider de créer et d’actionner une police municipale qui assurera le bon ordre, la sûreté et la sécurité des habitants ». Tout comme le Haut-commissaire, les maires sont donc en première ligne pour assurer l’ordre public. Or, il faut bien dire que sa gestion de la police municipale (celle de Nouméa est l’une des plus importantes de France) ne semble pas pour l’heure répondre aux inquiétudes des nouméens. Car si Sonia Lagarde a, depuis son élection, fait augmenter la présence de policiers sur les baies et dans les quartiers sud de la commune, dans les quartiers populaires en revanche, les forces de l’ordre sont, de facto, moins présentes. Raison pour laquelle Gaël Yanno estime que les deux propositions de la maire sont uniquement motivées par des arrières-pensées électorales :

« Ce retrait l’amène [Sonia Lagarde] à sortir de son chapeau une proposition totalement improvisée en matière d’insécurité qui tient plus du calcul politique que d’une véritable volonté d’agir (Gaël Yanno, 22/02/2018 ; sources : communiqué du MPC) »

A l’aube de nouvelles échéances électorales et en vue des provinciales et des municipales à venir, il parait évident que les joutes politiques ne sont pas terminées entre les deux anciens parlementaires. Gaël Yanno profitant du fait que le fameux « plan Marshall de la sécurité » promis par Sonia Lagarde aux Nouméens pour lutter contre la délinquance est resté à l’état de lettre morte…