La fin des acteurs et l’ascension des faiseurs

Il marche, seul, devant eux. L’image est saisissante : Elon Musk, l’homme qui ambitionne de coloniser Mars et d’électrifier la planète, traverse la nef de Notre-Dame devant une rangée d’anciens présidents et de figures politiques françaises qui le dévisagent. Dans ses pas, l’avenir. Dans leurs regards, une contemplation désabusée. L’un a bâti un empire technologique et accumulé une fortune de 300 milliards de dollars. Les autres, héritiers d’un système sclérosé, n’ont jamais rien construit de leurs mains et ont laissé derrière eux plus de 3 300 milliards de dettes et des réformes avortées. Elon Musk à Notre-Dame, c’est le futur observé par les figures du passé. Cette image, immortalisée lors de l’inauguration de la cathédrale, résume à elle seule le gouffre entre ceux qui bâtissent et ceux qui parlent. Elon Musk incarne une modernité ambitieuse et concrète. Il a construit des fusées, des voitures, des infrastructures, pendant que nos élites politiques, souvent issues du même moule mental, se contentent d’observer. Ils ne bâtissent pas : ils gèrent, administrent, et, trop souvent, détruisent.

David Guyenne : l’ombre des grands bâtisseurs

Cette fracture entre ceux qui agissent et ceux qui parlent ne se limite pas à une scène parisienne. Elle s’étend jusqu’à la Nouvelle-Calédonie, où l’on retrouve des figures comme David Guyenne, récemment réélu à la tête de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI). Brillant et éloquent, Guyenne parle, promet et trace de grands schémas. Mais agit-il vraiment ? Comme Musk, la Guyenne est censée représenter les bâtisseurs, les entrepreneurs qui osent et innovent. Mais à l’inverse de Musk, il semble plus occupé à jouer un rôle qu’à obtenir des résultats concrets. En tant que président de la CCI, il gère une institution avec 200 collaborateurs financée par des impôts. Pourtant, posez-lui des questions simples : Quels sont les coûts de la CCI ? Combien rapporte-t-elle réellement ? Quels sont les indicateurs concrets de sa gestion ? A-t-elle réduit ses coûts ou améliorer ses performances ? Aucune de ces réponses ne semble jamais émerger de son discours. Un vrai patron poserait ces questions, ferait des choix difficiles, chercherait à maximiser l’efficacité. Mais Guyenne préfère parler de « dialogue », « inclusion » et « prospérité ». Des mots creux, lisses et agréables aux oreilles, mais sans lien avec la réalité brutale du terrain. Guyenne ne gère pas la CCI comme un entrepreneur. Il gère sa carrière, son image, sa position. Et c’est là que réside le cœur du problème. Un homme comme Musk a construit des fusées pour atteindre Mars ; Guyenne promet la prospérité sans jamais définir comment il la financera. Si ses propres entreprises avaient été gérées comme il gère la CCI, elles auraient sombré depuis longtemps. Dans le monde réel, l’argent magique n’existe pas, chaque salarié doit justifier sa place, chaque euro doit être rentable, et chaque décision a des conséquences. Mais dans le monde de Guyenne, tout cela semble optionnel.

Un monde sans bâtisseurs

En observant David Guyenne et ses semblables, on ne peut qu’être saisi d’une mélancolie profonde. Où sont passés les vrais bâtisseurs ? Ces figures qui changeaient la vie des gens avec des actes, pas des discours ? Des hommes comme Robert Courte, Jacques Jeandot ou Philippe Pentecoste, qui ont marqué l’histoire économique de la Nouvelle-Calédonie. Robert Courte, visionnaire, a créé des entreprises innovantes et solides, répondant aux besoins des Calédoniens avec ingéniosité. Qui se souvient de Vigiplis ? Jacques Jeandot, ce géant de l’automobile, est arrivé en Nouvelle-Calédonie avec presque rien et a bâti un empire diversifié, laissant une empreinte indélébile derrière lui. Philippe Pentecoste, quant à lui, a révolutionné le commerce local en ouvrant le premier hypermarché du territoire, transformant radicalement le quotidien de tous les Calédoniens. Qui se souvient de l’ouverture d’Euromarché ? Ces hommes ne parlaient pas de prospérité. Ils la créaient. Ils ne se contentaient pas de promettre un avenir meilleur. Ils le construisaient. Mais ces figures s’éstompent, et à leur place, nous voyons des silhouettes apparaitre comme celle de David Guyenne. Des acteurs, pas des bâtisseurs.

L’évidence du futur

Cette image d’Elon Musk devant les figures politiques françaises est une métaphore parfaite. Musk incarne l’avenir, bâti sur l’audace, l’action et la vision. Ces dirigeants, eux, représentent le passé : un monde de dettes, de promesses creuses et de stagnation. Leur regard sur lui est celui de l’impuissance. Car ils savent qu’ils n’ont rien accompli de comparable. Ce fossé n’est pas seulement une question d’individus, mais un symptôme d’une société où les « élites » ne sont plus sélectionnées pour leur capacité à agir où pour ce qu’elles ont accompli, mais pour leur aptitude à plaire et à parler. Les vrais bâtisseurs, comme Musk, sont rares. Et leur rareté devrait nous inquiéter. Car ce sont eux, et non les élus ou les gestionnaires, qui présagent le progrès sur leurs épaules. Que restera-t-il lorsque ces bâtisseurs ne seront plus là ? Que restera-t-il lorsque les David Guyenne du monde auront remplacé les Elon Musk, sinon des discours vides, de bons sentiments et des promesses jamais tenues ? L’avenir appartient ceux qui construisent. Les autres ne font que jouer ou regarder.