Ne vous demandez pas ce que la France peut faire pour vous, demandez-vous ce que la Nouvelle-Calédonie peut faire pour la France

Avec le “peuple premier”, Manuel Valls fait du bien à la France ! Pendant des années, la Nouvelle-Calédonie a, en effet, été un laboratoire institutionnel et juridique d’exception. Une véritable boite de pétris pour les juristes : statuts hybrides, assemblée législative, citoyennetés restreintes, régime électoral gelé, reconnaissance de “peuples premiers” : autant d’entorses à la république Universaliste, au nom de la paix et du respect de l’identité autochtone. L’idée était simple : faire plaisir aux indépendantistes Kanaks, leur accorder une place à part, tout en maintenant l’ordre républicain. Une contradiction qui était censée rester confinée à cet archipel lointain. Mais ça c’était avant internet.

De la Nouvelle-Calédonie à la Métropole : une brèche idéologique

Car voilà que Manuel Valls, en visite en Nouvelle-Calédonie, lance une déclaration qui dépasse le cadre local : “Il y a un peuple premier, il y a un peuple Kanak (…) qui doit aller au bout de son émancipation et nous devons terminer la décolonisation.” Un simple discours ? Non, une brèche. Une fois prononcé, le concept de “peuple premier” quitte son enclave calédonienne et s’invite en métropole à la vitesse des réseaux sociaux. Et c’est là que la magie opère. Car si les Kanaks sont un peuple premier, pourquoi n’existerait-il pas aussi un peuple premier en France métropolitaine ? Des figures politiques comme Marion Maréchal s’en emparent, des comptes influents le revendiquent, des débats surgissent sur X et Facebook. Ils opposent militants d’extrême-droite et d’extrême gauche à des centristes macronnistes. Car si les deux extrêmes acceptent l’expression pour les kanaks, les premiers demandent à ce que les français de souche puissent en bénéficier aussi. Une hypothèse que les seconds nient formellement, attendu que pour la LFI, il existe des peuples premiers partout, sauf en France. Quant aux centristes, ils s’opposent carrément à ce concept, attendu que la République, comme Dieu-le-père, considère tous les hommes de la même façon, à « égalité ». Mais problème : Manuel Valls n’est plus sur cette ligne politique lorsqu’il franchit l’hémisphère sud. Alors, peu à peu, dans la polémique et le foutoir, la question s’impose : pourquoi la République reconnait-elle un peuple fondateur et autochtone dans un territoire d’outre-mer, mais pas en France métropolitaine ?

L’effet domino : quand l’exception devient la règle

Et voilà comment la Nouvelle-Calédonie se rend utile à la France. En étant le miroir grossissant des contradictions républicaines, en forçant à poser la question de la citoyenneté, de l’identité et des communautés historiques. Ce qui était conçu comme une exception réservée à la Calédonie s’est transformé en bombe à retardement pour la métropole. Une énième preuve que si la Vème République flanche encore et cède sur le dégel du corps électoral et le retour au droit commun, alors les Corses, les Bretons, les Guyanais, et bien d’autres viendront à leur tour demander le même traitement d’exception. Droit de vote pour les « peuples premiers », droit foncier et compétence fiscale… Voilà ce que veulent toutes les collectivités de France et encore davantage celles qui furent autrefois des territoires autonomes ou qui possèdent une identité forte. Or, la France est une république universaliste. Son principe fondamental est l’égalité. Comment justifier cette égalité si elle reconnaît des “peuples premiers” ici, mais pas là-bas ?

La Nouvelle-Calédonie, laboratoire des contradictions françaises ?

Et la machine s’emballe, dopée par la totale incohérence du Gouvernement national et des élites françaises sur ces questions. Les réactions s’enchaînent : de Bertrand Chameroy sur France 5 à Mathieu Bock-Côté sur CNews, les réseaux sociaux s’enflamment. Le débat est lancé. Et demain ? L’idée se propagera. Les Français la feront leur, découvrant peut-être que ce concept peut être un outil de défense identitaire, bien au-delà du Pacifique. En voulant régler le “problème calédonien”, la Vème République met donc en lumière ses propres contradictions. Et si, après tout, la Nouvelle-Calédonie était le laboratoire qui permettra à la France de comprendre, avant qu’il ne soit trop tard, que son identité mérite d’être préservée ?

En tout cas, Merci Manuel Valls.

Et merci, Nouvelle-Calédonie. Tu fais du bien à la France.