La stratégie de la CCAT vient-elle du Caucase ?

Alors que l’Etat d’Urgence vient d’être décrété sur l’ensemble de la Nouvelle-Calédonie et que l’armée a été dépêchée pour sécuriser les points les plus stratégiques du territoire, de nombreux Calédoniens sont toujours livrés à eux-mêmes, les forces de l’ordre (environ 2000 hommes) restant pour l’heure débordées. Selon les estimations du haussariat, on recense en effet 9 000 émeutiers dont 3 000 à 4 000 sur la seule ville de Nouméa. Pour autant, ce sont les méthodes et les cibles des émeutiers qui interrogent puisque leur objectif semble d’instaurer un climat de terreur par la destruction pure et simple de tout le tissu social calédonien. Explications, analyses et hypothèses. 

Le Général Douglas Mac Arthur avait coutume de dire : “Toutes les batailles perdues se résument en deux mots : TROP TARD !” En effet, le couvre-feu a été déclaré trop tard, tout comme l’envoi de renforts supplémentaires, tout comme l’établissement de l’Etat d’Urgence. Un constat partagé par la Présidente de la province Sud qui a déclaré face à plusieurs médias nationaux que « L’Etat n’a pas été capable de protéger la population la première nuit et les citoyens se sont organisés. Et heureusement ! Heureusement qu’ils défendent leurs femmes, leurs enfants, leurs entreprises et leurs maisons ! » Reste que le Haut-commissaire de la République, Louis Le Franc, maintient lui un discours qu’il estime, on l’imagine, impartial et mesuré en appelant les émeutiers et l’ensemble des Calédoniens qui se défendent à rentrer chez eux et à se désarmer (sous peine d’amendes et de peines de prison). Un positionnement qui place semble-t-il les terroristes de la CCAT au même niveau que les courageux citoyens qui défendent leurs biens et leurs familles comme ils le peuvent et avec les moyens dont ils disposent.

Car, en privé – et aussi sous le poids de la fatigue après ces derniers jours de guérillas urbaines – beaucoup de policiers et de gendarmes avouent que sans les milices citoyennes et les groupes de riverains qui défendent les différents quartiers du Grand Nouméa, la situation aurait été bien pire encore. Il faut donc partir du principe qu’il est quasiment impossible pour les autorités de l’Etat de notre époque de comprendre ce qu’il se passe vraiment et d’accepter l’idée que celui-ci est défaillant ou qu’il est devenu incapable, ici comme ailleurs en métropole, d’assurer désormais la sécurité de tous les Français (les émeutes de juillet 2023 en France ont ainsi beaucoup appris aux ennemis de la France ainsi qu’aux différents mouvements séparatistes de métropole comme d’Outre-mer). Aussi, face à ce déni, qui ne sera vraisemblablement dépassé lui aussi que trop tard, il apparait d’ici-là nécessaire de comprendre les enjeux et les objectifs sous-jacents de ces déferlements de haine. Car, à l’heure où nous écrivons ces lignes, tout laisse à penser que la situation est susceptible de continuer à s’empirer.

L’ombre de Bakou ?

Drapeau de la République d’Azerbaidjan lors de la marche du FLNKS du 13 avril 2024 © armenews.com 2024

Les émeutiers disposent en effet de modes de communication, d’une stratégie et d’une organisation bien établis qui surprend beaucoup d’observateurs. Or, selon le journaliste Babak Taghvaee, correspondant pour la BBC et expert en géopolitique, les responsables (cachés) de la CCAT bénéficieraient d’aides, du support et des conseils des services de renseignements étrangers de la République d’Azerbaïdjan (eux-mêmes formés par le FSB russe). Il estime en effet que ce pays « joue désormais un rôle important dans les émeutes en cours dans Nouméa ». Selon lui, les forces de sécurité françaises, en particulier la DGSE et la DGSI, n’ont pas suffisamment d’expériences et de connaissances pour faire face à la menace de la « guerre douce » que leur livre la République d’Azerbaïdjan :

« Les services de renseignement étranger de Baku utilisent différentes méthodes pour alimenter les émeutes en cours en Nouvelle-Calédonie. Ils utilisent des trolls internet (= faux comptes) pour diffuser des PSYOPS (=opération de guerre psychologique) contre la France sur diverses plateformes de réseaux sociaux. La République d’Azerbaïdjan utilise à la fois des moyens financiers et psychologiques pour soutenir les émeutiers armés de Nouvelle-Calédonie. (Babak Taghvaee, 16/05/24 ; Sources : X) »

Si cette information n’est pas confirmée par les autorités nationales, elle pourrait cependant expliquer certaines des méthodes de guérilla « modernes » auxquelles doivent faire face les forces de l’ordre du territoire : destruction des voies de communication, des canalisations, des différents outils de production, des réserves de carburant, d’alimentation et de médicaments ou encore, comme dans la presqu’île de Nouville, les coupures des câbles internet. Le tout afin de créer un véritable climat de terreur propice à mettre à genoux les forces Républicaines et donc l’Etat. Quel intérêt en effet pour la cause indépendantiste de bruler et de détruire des cliniques vétérinaires ou d’attaquer des lieux de cultes chrétiens ou bouddhistes ?

Arménie et Azerbaïdjan, France et Nouvelle-Calédonie : le billard a quatre bandes

Dès le mois de janvier de cette année, le parlement de l’Azerbaïdjan avait ainsi recommandé de couper tout lien économique avec la France. Il avait ensuite demandé de « prendre des mesures » en vue de la reconnaissance de l’indépendance de la Corse, de la Nouvelle-Calédonie mais aussi de la Polynésie française. Quelques mois plus tard, en avril, la visite d’une élue du FLNKS en République d’Azerbaïdjan et la signature d’un « protocole d’accord » entre le congrès de Nouvelle-Calédonie (dirigé par un indépendantiste) et le parlement de cette dictature du Caucase avait fait couler beaucoup d’encre sans que la population calédonienne ne comprenne vraiment de quoi il était question.

Mais la raison de ce rapprochement entre un état islamique d’Asie Mineure et les mouvements indépendantistes kanak du Pacifique Sud est très simple et repose sur un proverbe inventé en Inde au IVe siècle avant J.-C et que chacun connait bien : les ennemis de mes ennemis sont mes amis. La France est en effet l’un des principaux alliés de l’Arménie chrétienne, qui est elle-même l’ennemi héréditaire de l’Azerbaïdjan islamique. Or, les deux nations luttent depuis plus d’un siècle pour le contrôle du Haut-Karabagh, une petite enclave montagneuse qui correspond à la moitié de la superficie de la province Sud (4 000 km2) car la région est peuplée d’environ 120 000 Arméniens chrétiens.

On a les amis qu’on mérite…

Reste que les indépendantistes ont, depuis quarante ans, échoué dans deux domaines extrêmement importants pour un mouvement politique visant à accéder à l’indépendance. D’une part, ils n’ont pas gagné les suffrages et les cœurs de nouveaux électeurs. Comme l’avait déclaré le président de l’Union Calédonienne au lendemain des élections de 2014, sur le plateau de NC 1^ère : « Depuis trente ans, on n’a pas réussi à convaincre au-delà de notre camp ». Ce jour-là, Daniel Goa avouait une vérité : à savoir que les non-indépendantistes de Nouvelle-Calédonie ne se sont jamais ralliés – malgré le temps passé – au projet indépendantiste et, qu’ainsi, le FLNKS resterait minoritaire dans les urnes (ce que toutes les élections ont démontré depuis lors).

Et d’autre part, les indépendantistes ont surtout échoué à se faire des amis. Les différentes mouvances du FLNKS n’ont en effet trouvé nulle part de soutien de poids sur le plan international. Un peu à l’image de la cause palestinienne, ils ont perdu, décennie après décennie, tous les soutiens internationaux que les idées et les mouvements de libération des peuples, issus des années 60, plaçaient pourtant de leur côté. Ainsi en est-il aussi des principaux pays anglo-saxons de la région, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, qui voient désormais d’un bon œil la présence française dans le pacifique et qui s’inquiètent d’un hypothétique rapprochement des indépendantistes kanak avec la Chine. Le Japon, (actionnaire minoritaire de la SLN) a dernièrement placé son consulat honoraire de Nouméa sous l’autorité de l’ambassadeur du Japon en France, c’est-à-dire à Paris. Une façon de reconnaitre et de légitimer la présence Française dans la région. De même, l’ONU, dont les observateurs ont suivi et contrôlé l’ensemble des consultations référendaires, a pris acte des résultats des différents scrutins, sans rien trouvé à redire. Ainsi, mis à part certains mouvements autonomistes Corses et quelques groupuscules séparatistes d’Outre-mer, la liste des soutiens internationaux du FLNKS et donc de la cause indépendantiste se résume à la seule République d’Azerbaïdjan…

« Aucun de nous, en agissant seul, ne peut atteindre le succès »

Nelson MANDELA

Les conseils aux groupes de vigilance :

• Pas d’armes à feu à l’extérieur, chez vous ça vous regarde ;
• Sanctuarisez une maison du quartier où vous vous trouvez, dans laquelle vous pouvez tenir un siège, même s’il faut abandonner les autres ;
• Mettez un brassard blanc au bras pour être reconnaissable ;
• Evitez les visages trop masqués ;
• Au moindre danger, rentrez dans un endroit que vous pouvez défendre ;
• Recenser les extincteurs dans vos quartiers pour pouvoir éteindre les feux quand c’est nécessaire ;
• Préparez les tuyaux d’arrosage à vos domiciles ;
• Ne vous mettez pas en danger ;
• Les séniors peuvent être volontaires et de bon conseil, mais respectez vos limites ;
• Pas d’enfants sur les barrages ;
• Prévoir des lunettes ou masques de plongée pour se protéger de la fumée et des Lacrymos ;
• Légitime défense : on répond à un acte violent de manière proportionnée immédiatement au moment des faits et pas plus tard quand on les rattrape (afin de rester dans un cadre légal) ;
• Si vous entravez un individu pour le remettre aux forces de police, appelez les secours sans trop lui bourriner la gueule ;
• Prenez soin de vous et restez solidaires.