« Nous sommes en guerre », mais contre qui ?

Guerriers et martiaux, nos responsables politiques, d’Hollande et Valls à Sarkozy, ont lancé la charge pour rassurer la France et garantir aux Français que le crime ne resterait pas impuni. « Nous sommes en guerre », nous ont-ils prévenus, une guerre, sans front ni arrière, qui frappe donc désormais en priorité les citoyens. Ils nous ont promis aussi que nous gagnerions cette guerre… Mais cette rhétorique belliqueuse se heurte à une réalité que soulignerait n’importe quel stratège à deux balles, à savoir que les guerres ne peuvent se gagner que si l’on sait au moins qui est l’ennemi.

Daech est l’ennemi nous dit-on, mais Paris n’a pas été attaquée par des bédouins syriens fous de dieu sorti d’Alep ou des bords de l’Euphrate. Le visage de cet ennemi que l’on nous désigne, est celui d’un Français, jeune, musulman, paumé, pour la plupart d’origine arabe et issu des banlieues. Depuis 1995, les auteurs des actes qui ont ensanglanté la France ne sont ni Corses, ni Bretons, ni Basques, ni Alsaciens, ni Lillois, nul Colombani, Béotéguy, de Kerilis, Schmitt ou Delanoy. Ils s’appellent Khaled Kelkal, Abdelkader Bouhadjar, Rachid Ramda, Mohamed Mera, Mehdi Nemmouche, Saïd Kouachi, Amedy Coulibaly, Yassin Salhi, dans une liste macabre hélas non exhaustive. Et ça, ça nous pose un sacré problème parce que cela ruine toutes les politiques mises en œuvre en France depuis la fin des colonies en matière d’intégration, d’éducation, de jeunesse et d’emploi. Au prétexte qu’au 20ème siècle, Italiens, Espagnols, Portugais, Polonais avaient su s’intégrer, nous avons pensé que notre modèle tiendrait la route sans problème. La bien-pensance post soixante-huitarde, qui régit depuis trop longtemps la pensée politique, culturelle et médiatique française, nous a fait croire que cela marcherait et jeté l’opprobre sur tous ceux qui objectaient en vain, que l’immigration maghrébine, sahélienne et sub-saharienne, ne pourrait à terme qu’entrer en conflit avec une société qui, quoi qu’on en pense, est issue d’une civilisation européenne et judéo-chrétienne.

La même bien-pensance, qui refuse mordicus d’avouer l’échec de sa pensée, hurle dans la nuit des attentats qu’il ne faut pas voir dans ce massacre, un choc des civilisations… Ce réflexe de déserteur montre bien que dans cette guerre idéologique que l’on nous invite à mener, nous perdons une à une toutes nos batailles, car nos armes enrayées sont inutilisables.

L’intelligentsia française est coupable de ne pas s’être engagée comme sentinelle postée aux frontières des valeurs qui sont les nôtres. Nos valeurs ? Oh, non pas les concepts bobos éthérés et mondialisants que l’on nous assène depuis trente ans, mais celles qui ont fait tenir les poilus de Verdun et ne pas s’éteindre la flamme de la Résistance. J’apparais archaïque, un tantinet réac ? Mais quoi, la Patrie, mot que cette même intelligentsia n’ose même plus prononcer sinon pour le vomir, n’est-elle pas en danger ? Et le peuple de France, devenu maintenant une chair à mitraille, ne réclame-t-il pas qu’on le défende les armes à la main qu’elle soit Famas ou Mont-Blanc ? Nous sommes en guerre soit. Je crains hélas que pour l’heure, ce soit Sedan, Ypres ou Dunkerque plutôt que la Marne ou Iéna…

Caton