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La Nouvelle-Calédonie malade de ses roussettes

L’information a fait l’effet d’une bombe. En pleine crise sanitaire liée au coronavirus, on apprend qu’une maladie potentiellement mortelle transmise par les chauve-souris circule en Nouvelle-Calédonie. Et ce n’est pas n’importe qui qui l’annonce, mais le professeur Didier Raoult, sommité scientifique mondialement reconnue par ses pairs, mais aussi par des millions de Français. A l’évidence l’affaire est grave.

Non, il ne faut pas prendre le cas à la légère. A l’heure du Covid-19 soupçonné un temps d’avoir été transmis par une chauve-souris, voilà que l’on nous révèle que notre roussette calédonienne pourrait être à l’origine d’une maladie potentiellement mortelle. On sait que la chauve-souris est un transmetteur de virus, le souci est que cette fois elle véhiculerait une maladie rare qui en Nouvelle-Calédonie entre 2012 et 2019 a touché une quinzaine de personnes et fait quatre morts.

Quinze cas et quatre morts

Selon une étude du service de Médecine interne et Infectiologie du CHT de Nouméa, « depuis les années 1990, des internistes et infectiologues du CHT de Nouméa suspectent une maladie rare possiblement due à une bactérie intracellulaire transmise par les roussettes. » Et plus récemment, en 2017, après la découverte de cas de Calédoniens souffrant de manière inexpliquée de perte de poids, de fièvre, d’une augmentation de la rate et de troubles hématologiques, c’est-à-dire d’anomalies dans le sang, des prélèvements ont été envoyés à l’IHU (institut Hospitalo-universitaire de Marseille) du célèbre professeur Raoult et une bactérie, la Mycoplama haemohominis a été identifiée. Interrogé au sujet du Covid-19 sur Radio Classique par Guillaume Durand, le professeur Raoult a confirmé l’étude de cette nouvelle maladie :

 « Je peux vous dire, a-t-il déclaré, que l’on est en train de décrire une maladie de même nature en Nouvelle-Calédonie parce qu’ils mangent des chauves-souris, et comme ils mangent des chauves-souris, il y a une maladie spécifique des chauves-souris en Nouvelle-Calédonie qui se répand probablement partout en Océanie (Didier RAOULT ; sources : Radio Classique) »

Dans l’étude de cette maladie, on a mis au point un test diagnostique, les fameux PCR dont on parle tant avec le coronavirus et 200 roussettes vont être collectées pour une vaste étude dont les résultats sont attendus pour 2021. Cette étude porte évidemment sur le type de maladie qui serait transmise par nos chauve-souris, mais aussi sur son mode de transmission. A noter que l’équipe en charge de cette étude s’est vu verser l’équivalent de 3 millions cfp par le Fonds Pacifique du ministère français des Affaires étrangères.

Une vaste étude

L’étude qui est donc menée va se pencher sur les cas passés pendant la période 2009-2017, mais aussi sur ce qui se passe actuellement et va consister à décrire cette nouvelle zoonose, c’est-à-dire des maladies infectieuses transmises par des animaux vertébrés à l’homme, comme la rage par exemple, et émettre des hypothèses sur les modes possibles de transmission. La chauve-souris est connue pour transmettre des zoonoses. C’est le cas du Nipah à l’origine d’une importante épidémie en Malaisie en 1999 et également détecté en Australie, à Singapour, au Bangladesh et en Inde. Une étude rédigée en 2006 par le docteur par Hélène Fagherazzi-Pagel, ingénieur de recherche CNRS, a conclu que le Nipah pouvait être transmise par la chauve-souris.  « Le dernier mécanisme connu, écrit-elle, des chauves-souris contaminant des dattes, et transmission par le jus de datte puis transmission interhumaine par contact rapproché. Cet agent est par ailleurs classé dans la catégorie des germes présentant un danger biologique, c’est-à-dire des microorganismes devant être manipulés dans un laboratoire P4 de haute sécurité biologique. » Et l’on se souvient qu’en 2015 on avait découvert le virus du Nipah sur des roussettes du Parc forestier. La transmission de la nouvelle zoonose par la roussette ne fait semble-t-il aucun doute. Selon l’étude du CHT, « l’hypothèse d’une transmission par les roussettes est appuyée par l’analyse préliminaire de 39 encéphales et rates de roussettes collectées par la DAVAR en Province Sud ayant montré la présence de candidatus Mycoplasma haemohominis chez 21 des 39 roussettes, soit 54%, provenant des 3 espèces circulant en Nouvelle Calédonie. » En revanche, le mode de transmission est à cette heure totalement inconnue, donc toutes les hypothèses sont étudiées : soit par la consommation de roussettes, soit par contact avec les fluides de la roussette qu’il s’agisse de son sang, de ses urines ou ses excréments, voire même par la consommation de fruits contaminés par des roussettes. Ce dont on est certain en revanche est qu’il faut avoir été en contact avec des roussettes pour attraper le virus.

La Nouvelle-Calédonie sous les projecteurs

L’étude du CHT et de l’IHU de Marseille montre que le génome de la Mycoplama haemohominis a été retrouvé dans d’autres espèces de chauves souris dans d’autres zones du monde. Elle conclut que la maladie serait possiblement présente ailleurs en Asie-Pacifique et dans l’océan indien. Toutefois nous présentons un cas particulier en Nouvelle-Calédonie du fait que nous consommons la roussette. Nous en consommons tellement d’ailleurs que l’espèce est quasiment en voie de disparition et qu’il conviendrait sans doute d’en interdire la chasse, ne serait-ce que temporairement pour sauver ce qui peut l’être encore de ces animaux. Toujours est-il les autorités devraient prendre cette affaire au sérieux, en ces temps où une maladie inconnue bouleverse le monde. « Nos chauves-souris possèdent elles aussi de nombreux virus et bactéries. A l’occasion de cette pandémie, je suis étonné qu’il n’y ait pas eu plus de précautions par rapport aux contacts avec les animaux », déclare ainsi Cyrille Goaran de l’Institut Pasteur au magazine Actu.nc dans son dernier numéro. En tous les cas, les déclarations du professeur Raoult, révélé par Martine Cornaille sur Facebook, place la Nouvelle-Calédonie sous les projecteurs d’une manière à laquelle personne ne s’attendait.

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Hubert B

Hubert B. a rejoint Calédosphère au tout début de l’année 2015. Enfant du pays, il a grandi à Nouméa et a ensuite bourlingué durant près de vingt ans au gré de ses envies et des hasards de la vie. Fils d’une bibliothécaire/documentaliste, il a été tour à tour enseignant, pigiste, formateur mais c’est finalement vers l’écriture qu’il a choisi de revenir. Succinct, précis, parfois laconique, si son style est volontiers direct, ses intérêts sont éclectiques et toujours tournés vers l’actualité. Sa citation favorite : « Le journaliste doit avoir le talent de ne parler que de celui des autres »

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XYY .
XYY
23 juillet 2020 18:28

Alik.
Je choisis cet article parce qu’il n’est pas trop encombré.
Je suppose vous avez lu la page 7 de LNC du Jeudi 23 Juillet 2020, vous qui vous posez de temps en temps des questions sur la production de matière grise sur ce Territoire.
La Province Sud récompense 40 étudiants méritants
En consultant la liste des récipiendaires et en regardant la photo, je suis catastrophé (sincèrement) de l’absence, au prime abord*, de représentants du peuple premier.

* ma méthode ne valant guère mieux que celle de Mado© Ounou.

Alika Antitra
Alika Antitra
Répondre à   XYY
23 juillet 2020 18:54

XYY : “Je suppose vous avez lu la page 7 de LNC” Pas acheté ce jour. Par contre, il y a une ou deux semaines, un reportage de Caledonia sur le juvenat de Poindimié. Ce qui me gêne, c’est qu’on parle davantage de Sciences Po que (au hasard) de l’Institut National Polytechnique de Grenoble où (parmi d’autres) votre plantureuse favorite a passé quelques années … Je ne voudrais pas revenir sur la Guyane, mais les Guyanais (du moins ceux de la côte) ont fait depuis longtemps leur transition vers le monde technique. Un exemple sous les feux des projecteurs :… Lire la suite »

XYY .
XYY
Répondre à   Alika Antitra
24 juillet 2020 10:57

Alik.
“Ce qui me gêne”.
Liste des récipiendaires. Ça va, Sciences Po n’est pas hyper-représentée…
comment image

kaya
kaya
26 mai 2020 15:01

pour ça qu’on a pas de corona ici, on est déjà immunisé hahahé

josiane latour
josiane latour
26 mai 2020 08:10

Il faut savoir qu’il n’existe qu’une seule roussette comestible en NC, c’est la roussette de cuisine.

XYY
XYY
Répondre à   josyppin
26 mai 2020 11:29

josyppin.
“roussette de cuisine”. Dont la fameuse roussette au whisky (recette donnée par Gil Moglia dans “La Calédonie en 60 recettes”.

Toto
Toto
26 mai 2020 06:47

Donc, 4 morts en 7 ans.

Pour rappel, les accidents de la route tuent chaque année plus de 60 personnes sur le caillou.

S’il y’a matière à s’inquiéter et s’il faut prendre action, ce n’est à mon avis par pour les roussettes mais pour les boeufs qui roulent sur nos routes.

Clarkounet.... Gaybeuloïde
Clark
25 mai 2020 09:48

C’est le même qui explique qu’il ne faut pas vacciner contre la rougeole parce qu’il n’y a qu’un mort par an? Raoult est une grande gueule , et ses fanfaronnades vont y revenir très vite (dans sa grande gueule!). Il va falloir qu’il choisisse dans le tas de conneries qu’il a dites depuis des années. Y’a un “tri sélectif” à faire: ce type est tellement imbu de lui-même qu’on découvre que ça fait quand même un moment qu’il pérore à la télé… On dirait le “Stéphane Bourgoin” des épidémiologistes-polémistes… Avec la même destinée… Pas étonnant que le tas de pines… Lire la suite »

Rigoberto
Rigoberto
Répondre à   Clark
26 mai 2020 07:02

Interview de Didier Raoult dans Mediapart en juin 2019 : “La première question concernant cette polémique : faut-il faire les vaccins contre la rougeole ? La réponse de Didier Raoult est, bien entendu. La question que se pose le scientifique est la suivante. Est-ce que la maladie de la rougeole qui se développe actuellement est due à des gens qui sont devenus fous à cause leur peur de l’autisme ou provient-elle de raisons plus complexes ? Le professeur ajoute qu’il n’est pas question de revenir sur le vaccin tel qu’il est disponible maintenant. Il faut faire le vaccin contre la… Lire la suite »

Clarkounet.... Gaybeuloïde
Clark
Répondre à   Rigoberto
26 mai 2020 11:59

OK je vais rechercher la vidéo où il dit exactement le contraire alors… Parce que, en plus ce mec ne dit pas toujours la même chose.

Clarkounet.... Gaybeuloïde
Clark
Répondre à   Clark
26 mai 2020 12:08

Sur le reste des vaccins, il fait un choix selon ses envies… Un coup la maladie est éradiquée, un coup elle n’existe presque plus, mais “il sait”!

Donc le mec dit tout et son contraire. il prétendait à l’époque que la rougeole n’existait plus que dans les camps des gens du voyage…

A 4 minutes 36 …

https://youtu.be/EbOzhsFBGBw

Clarkounet.... Gaybeuloïde
Clark
Répondre à   Clark
26 mai 2020 12:28

Dans une autre interview, on lit: “Un vaccin efficace
D’après Didier Raoult, la maladie pourrait toucher un moins grand nombre de personnes si plus de gens se vaccinaient.”

Donc, ce que je dis, c’est que ce mec dit ce qu’il veut bien à qui il veut bien. et par exemple sur C à vous, son seul objectif était de faire passer les journalistes pour des cons.

Ce type est un CONNARD!

Son traitement à la (hydroxy)choloquine, même associé à autrechose, est inefficace.

Mais forcément: lui il sait, et tous les autres scientifiques sont des cons.

Clarkounet.... Gaybeuloïde
Clark
Répondre à   Clark
26 mai 2020 12:29

Au fait c’est sur sa propre page “didierraoult.com”…ouais.. parce que le mec il a une page à sa gloire, en plus…

josiane latour
josiane latour
25 mai 2020 09:35

Il faudrait habituer les roussettes à ne plus aller sur l’érythrine mais sur la chloroquine.

XXX
XXX
25 mai 2020 08:59

Virus pour virus, je me demande quand même si virus du racisme (versus colonial et son pendant décolonial) n’est pas plus grave pour notre avenir que celui véhiculé par les Roussettes ?

Truc Machin
Truc Machin
Répondre à   XXX
29 mai 2020 07:39

XXX,

Je vous plus de connerie que de racisme, moi…

XXX
XXX
Répondre à   Truc Machin
30 mai 2020 09:11

@Eric- Peut-être avez vous raison. Mais je pense quand même que le risque est grand en ne nommant pas les choses pour ce qu’elles sont(ici, le racisme) de ne jamais pouvoir les traiter et les dépasser. Dans le fond, ce n’est pas le racisme en tant que tel qui me pose problème, tant de mon point de vue, il est inhérent à l’être humain, non, ce qui m’inquiète c’est le fait qu’il puisse s’exprimer quasiment sans retenue dans l’espace public. Avec une question subsidiaire : peux-t-on vivre en société sans tabou, sans interdit ? Pour moi, l’expression raciste, (celle des… Lire la suite »

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