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Calédonia condamnée : Dang et Karembeu vont-ils sauver leur chaîne TV ?

Depuis plusieurs semaines, l’avenir de Calédonia TV est suspendu à un fil. La chaîne, qui se présente comme une vitrine du pluralisme calédonien, est en réalité le symbole parfait de ce qui gangrène les médias locaux : un modèle économique absurde et une hypocrisie totale de ses actionnaires. Car si Calédonia ferme demain, ce n’est pas faute de moyens, mais faute d’investissements. Et c’est bien là toute l’ironie de la situation : les donneurs de leçons du journalisme local refusant d’appliquer à eux-mêmes les règles qu’ils imposent aux autres. Zapping.

En 2017, Calédosphère se réjouissait de la transformation de NCTV en Calédonia, une nouvelle chaîne TV censée apporter plus de pluralité au paysage audiovisuel calédonien. L’idée nous semblait juste : pour la première fois, les indépendantistes allaient pouvoir gérer un véritable média mainstream, leur offrant une formation concrète à l’économie des médias, à la production audiovisuelle et à l’information. Jusque-là, ils ne possédaient que des soutiens militants sans véritable professionnalisation.

Notre position était pragmatique : une société stable et démocratique a besoin d’un paysage médiatique diversifié. Il nous semblait sain que les indépendantistes apprennent à gérer un média avec des contraintes réelles, loin des logiques de la communication politique. Mais huit ans plus tard, le constat est amer : Calédonia s’effondre. Non pas par manque de moyens, mais parce que son modèle économique était vicié dès le départ et que ses propres actionnaires refusent aujourd’hui de la sauver.

Un problème d’argent ? Non, un problème de répartition

Commençons par tuer un mythe : le problème de Calédonia n’est pas l’argent. En additionnant toutes les aides, transferts et subventions, le paysage médiatique calédonien bénéficie d’environ 4,5 milliards XPF par an d’argent public, auxquels s’ajoutent entre 800 millions et 1.2 milliard XPF de recettes publicitaires. Alors pourquoi la télévision de la province Nord est-elle en faillite ? Parce que 80 % des aides publiques vont directement à NC1ère (soit 2,8 milliards sur ses plus de 3 milliards de budget). Il suffirait de réaffecter ne serait-ce que 10 % de cette somme pour sauver Calédonia.

Cela n’a rien d’impossible. L’Islande, à population équivalente, à trois chaînes dont deux privées. La Polynésie Française, elle, en a deux, dont une privée. Mais en Nouvelle-Calédonie, l’Etat subventionne massivement une seule chaîne dominante qui étrangle tout le reste du paysage audiovisuel. La solution est donc simple : une meilleure répartition des fonds publics, accompagnée d’un investissement privé sérieux.

Les actionnaires de Calédonia : absents quand il faut payer ?

C’est ici que la situation devient franchement risible. Depuis quinze ans, tous les journalistes de Calédonia (et de NC1ère, et de LNC, etc…) ont clamé à longueur de reportages et d’articles à charge que les actionnaires privés devaient « prendre leurs responsabilités » et renflouer les entreprises calédoniennes en difficulté. Glencore devait sauver l’usine du Nord. Eramet devait compenser sans fin les pertes de la SLN. Le groupe Jeandot devait continuer à financer LNC malgré des pertes abyssales et une rédaction hostile. Mais quand il s’agit d’eux, le discours change. Où sont leurs actionnaires aujourd’hui ?

Christian Karembeu (actionnaire direct de la société SRT), figure de proue et parrain de la chaîne, pourrait largement réinvestir une partie de sa fortune pour la sauver. De même, André Dang, milliardaire qui a fait fortune (entre autres) grâce à la SMSP et propriétaire de Sedageford Trading Ltd à Hong Kong (laquelle détient des parts dans STR, la société exploitante de Calédonia), pourrait facilement injecter du capital pour assurer la survie de la chaîne. Son fils, Jean-Pierre Dang, propriétaire de Holdenna, société qui contrôle désormais Les Nouvelles Calédoniennes, pourrait lui aussi proposer un soutien financier. Alors, pourquoi ne le font-ils pas ? Tout simplement parce qu’ils savent que Calédonia n’est pas un modèle viable. Ils ne croient pas en leur propre projet.

L’hypocrisie des journalistes de LNC et de Calédonia

Les journalistes des Nouvelles Calédoniennes ont toujours eu une relation schizophrène avec leurs actionnaires. En 2013, ils ont fait grève contre Bernard Tapie. En 2016, ils s’attaquaient directement à Jacques Jeandot, principal actionnaire du groupe Melchior, le forçant finalement à lâcher l’affaire. Pendant des années, ils ont diabolisé toute tentative d’investissement privé dans la presse calédonienne. Mais quand Jean-Pierre Dang rachète LNC, silence radio. Cette fois, pas de tribune vengeresse ni de motion de défiance. Ils ont applaudi leur propre mise sous tutelle.

Aujourd’hui, ces mêmes journalistes versent des larmes sur la disparition de leur partenaire Calédonia. Ils réclament l’aide des pouvoirs publics, tout en ignorant soigneusement une question essentielle : pourquoi les propres actionnaires de la chaîne ne la sauvent-ils pas ? Pourquoi André Dang et Christian Karembeu, tous deux actionnaires de Calédonia via la SRT, ne mettent-ils pas la main à la poche ? Au lieu d’interroger cette contradiction, LNC s’enferme dans la posture victimaire et joue les partenaires solidaires, publiant une note de soutien bienveillante : “Partenaire de Calédonia depuis 2023, la rédaction des Nouvelles calédoniennes apporte tout son soutien aux équipes dans cette période difficile.” Mais où est leur indignation quand il s’agit d’en appeler aux actionnaires privés ? Pourquoi serait-ce – encore – les contribuables qui devraient payer ?

Deux rédactions qui ont creusé leur propre tombe

Si Calédonia et LNC sont aujourd’hui en crise, c’est avant tout à cause de leurs propres rédactions. Des rédactions déconnectées du réel, qui ont combattu les investisseurs privés jusqu’à ce qu’ils fuient. Des journalistes qui se croyaient intouchables, refusant d’admettre qu’ils ne représentaient qu’une infime partie de l’opinion publique. Une arrogance idéologique qui les a menés à leur propre chute. En réalité, Calédonia et LNC ne sont pas victimes d’un manque d’argent. Elles sont victimes de leur propre aveuglement.

Comme disait Churchill : “Quand on a vingt ans et qu’on n’est pas de gauche, c’est qu’on n’a pas de cœur. Quand on a quarante ans et qu’on est encore de gauche, c’est qu’on n’a pas de tête.” Il serait peut-être temps que ces “rédactions” arrêtent de se réclamer du socialisme pour elles-mêmes tout en exigeant du libéralisme pour les autres. Afuera !

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JNC

Ancien journaliste, aujourd’hui à la retraite, JNC a été l’un des tous premiers contributeurs officiels du média. Curieux, travailleur, attentif aux soubresauts de l’actualité, il sait conserver une certaine distance vis-à-vis de ses sujets. Volontiers pédagogue, jamais caricatural, souvent indigné, il conserve intact sa capacité à remettre en question la société calédonienne qu’il connait et décrit au jour le jour. Son crédo : « c’est l’actualité qui décide, pas nous »

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Nat
Nat
21 mars 2025 07:44

NC1 ère ne bénéficie d’aucun fond de la NC. Tout le financement vient de France Télévision et par conséquent du contribuable métropolitain via la redevance.

ditou
ditou
20 mars 2025 16:21

“Parce que 80 % des aides publiques vont directement à NC1ère (soit 2,8 milliards sur ses plus de 3 milliards de budget). Il suffirait de réaffecter ne serait-ce que 10 % de cette somme pour sauver Calédonia.” NC1er chaine public, elle aurait dû avoir 100% des aides publiques et non 80%. NON, NON, NON, pas de réaffectation de somme pour Calédonia, ni 10% ni même 1%. Quelle ferme immédiatement cela me réjouirait. Les parasites de ce genre, n’ont pas de place sur notre île. Il faudrait fermer toutes les entreprises indépendantistes, après ce qu’ils ont fait en 2024, je trouve que… Lire la suite »

ditou
ditou
20 mars 2025 16:04

J’ignorais que Calédonia était NCTV. Dans la vie, on a ce que l’on mérite. Et une faillite, c’est le moins, qu’il puisse mériter. Je remercie le ciel pour cette bonne nouvelle. Comme vous le comprenez, j’ai une dent contre NCTV qui est donc Calédonia. Je n’en dirai pas plus, car c’est un problème d’ordre privé. “Un problème d’argent ? Non, un problème de répartition” Je ne sais pas pour Calédonia, mais pour NCTV c’était bien un problème d’argent. Ils ont laissé des dettes impayés et ils ont changé de nom, pour ne pas les devoir. Mais comme je dis, un… Lire la suite »

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