Policiers municipaux : faut-il mieux les armer ?

Après que la députée Sonia Lagarde ait interpellé le ministre de l’intérieur pour qu’il autorise les policiers municipaux calédoniens à s’équiper en armes de catégorie C, le maire du Mont-Dore a fait savoir qu’il s’opposerait à une telle disposition sur sa commune. Duel et explications.

Suite aux attentats de Paris et à l’assassinat d’une policière municipale par l’un des terroristes, Manuel Valls a décidé de mieux équiper les forces municipales de France. 4000 revolvers et 8000 gilets pare-balles seront ainsi mis à la disposition des maires des grandes communes. Profitant de l’occasion et arguant que « depuis la présidence de M. Sarkozy, la vente d’armes est libéralisée en Nouvelle-Calédonie », la maire de Nouméa a fait remarquer devant la représentation nationale la semaine dernière que « nos policiers municipaux ne disposent toujours que de tonfas et de bombes lacrymogènes pour assurer leur sécurité ». En effet, le ministère de l’intérieur n’a pas encore fait respecter l’engagement de François Hollande ; le Président de la République ayant déclaré lors de sa visite sur le territoire que le décret autorisant les policiers municipaux à s’équiper en armes de catégorie C* serait bientôt pris. Ainsi, le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve a assuré la députée que celui-ci serait signé très prochainement :

Il faut un décret en Conseil d’État. Comme je vous l’avais indiqué, ce décret a été rédigé par le ministère de l’intérieur ; il fait l’objet d’ultimes concertations en vue de sa publication à la fin du mois de février, de sorte que vous puissiez mettre en œuvre alors la mesure que vous appelez de vos vœux (Bernard Cazeneuve)

De faux policiers au Mont-Dore ?

Sur le territoire, la mairie du Mont-Dore (3ème commune de Calédonie en nombre d’habitants) a déjà fait savoir par son adjoint en charge de la sécurité qu’elle était totalement opposée à une telle mesure :

Il est hors de question pour nous de doter la police municipale d’armes, d’armes à feu. On estime que le service d’ordre c’est de compétence de l’Etat et de deux, les missions de proximité qu’exercent la police municipale ne nécessitent pas d’armes quelles qu’elles soient ( Eddie Lecourieux, 1er adjoint au maire du Mont-Dore)

Aucune arme donc mais, dernièrement, la mairie du Mont-Dore a néanmoins choisi de faire l’acquisition de gilets pare-balles. Une conséquence des évènements de Saint-Louis au cours desquels plusieurs agents des forces de l’ordre ont été pris pour cible par des tireurs embusqués. Cependant, ce ne serait pas seulement parce qu’elle estime que les policiers municipaux n’en ont pas besoin que la mairie du Mont-Dore ne souhaite pas les voir s’équiper en armes. Selon un cadre de la Fédération des Fonctionnaires, c’est simplement parce que leur statut le leur interdit: ils ne seraient recruter en vérité par la mairie qu’en tant que gardes-champêtres et ce statut ne leur permet pas de détenir une arme !

« Les auteurs ciblent leurs actes sur les forces de l’ordre »

Alors Nouméa choisirait de s’équiper soudainement en armes à feu? En fait, la réalité semble toute autre. Selon un officier municipal, la mairie de Nouméa avait lors de la dernière mandature fait l’acquisition d’une douzaine de Flash-Ball. Ceux-ci restent depuis inutilisés car ils sont considérés comme des armes de catégorie C (tout comme les Tazers). Sonia Lagarde essaierait donc de faire pression sur le Gouvernement central pour que les policiers de Nouméa, habilités à porter seulement des armes de catégorie B, soient bientôt autorisés à utiliser ces Flash-Ball et peut-être plus tard des Tazers. Une mesure censée répondre à la crainte des agents qui estiment leur mission de plus en plus risquée. Un sentiment que partage la gendarmerie, laquelle s’était exprimée à la fin du mois dernier :

Cambriolages, escroqueries, violence physiques… Les actes de délinquance en Nouvelle-Calédonie se sont intensifiés. Une situation préoccupante face à des auteurs de plus en plus jeunes, souvent mineurs. Les auteurs ciblent leurs actes sur les forces de l’ordre. Quatorze tirs à l’arme à feu en 2014 contre six en 2013 selon les chiffres de la gendarmerie nationale. La volonté de blesser ou de tuer est devenue plus affirmée (Sources : NC 1ère, journal télévisé du 29/01/2015)

Dans un article de Nouvelle-Calédonie 1ère, suite à une déclaration de la Procureure de la république, la journaliste Sheïma Riahi révélait que le nombre de tirs sur les forces de l’ordre avait plus que doubler en un an et que « la volonté de blesser ou de tuer est devenue plus affirmée » chez les auteurs. La lutte contre ces derniers, souvent mineurs, constituent donc une des priorités des forces de l’ordre calédoniennes :

La préoccupation première c’est la part que prenne les mineurs dans la délinquance puisque l’on a un taux d’implication des mineurs dans la délinquance générale, toutes zones confondues, qui est à peu près de 27-28% et dans la délinquance de proximité – celle qui touche plus fortement les gens – elle frôle les 45-47% selon les années (Claire Lanet, Procureur de la république)

Reste que du côté du Gouvernement de Manuel Valls, le décret réglementant la vente d’armes se fait toujours attendre. Un certain Victorin Lurel avait promis qu’il serait bientôt signé. A l’époque, il était encore ministre des Outremers…

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