La France des trois

Le bleu envahit la France. La nette victoire de l’UMP et le score historique du Front national dans des élections locales, sont à en juger les premiers résultats, les principaux enseignements de ce 22 mars 2015. Surprises

S’il y a un mot à retenir pour ce premier tour des départementales version 2015, c’est celui de surprise. Ce fut finalement une participation un peu plus forte que prévue, alors que de nombreux sondages prédisaient une abstention record. C’est un FN haut qui salue un « score historique » mais qui ne pourra pas parader en « premier parti de France », tel qu’il l’avait fait en mai dernier pour les européennes. Le PS qui contre toute attente résiste, et une alliance « rouge verte » qui frise le score à deux chiffres. L’UMP partie pour ces élections unis avec l’UDI dans près de 80% des cantons, arrive, certes en tête de ce premier tour de scrutin mais les deux blocs droite et gauche font jeu égal au soir de ce 22 mars 2015.

Des électeurs qui sont allés voter

Un nouveau mode de scrutin taxé par certains d’illisible, avec une première mondiale, ces binômes hommes-femmes, qui rendront paritaires les futures assemblées départementales. On se souvient que lors de la réforme territoriale, de nombreux cantons furent redécoupés et que de nombreuses personnalités étaient montées au créneau, tels Bernadette Chirac pour garder leur canton intact. A priori, ce scrutin rassemblait toutes les conditions pour une abstention record. A 49%, celle-ci est finalement plus faible qu’attendu. En 2011 pour le premier tour des cantonales, l’abstention avait grimpé à 55,68%, mais seule la moitié des sièges était alors en jeu, alors qu’en 2015 c’est l’ensemble des sièges qui était en jeu. Ce qui devait être une simple élection locale, c’est transformé en scrutin national, une sorte de mini-législative avant l’heure, car pour les partis traditionnels, cette élection revêtait un caractère particulier. Pour Nicolas Sarkozy le 22 mars 2015 était le premier test depuis son arrivée à la tête de l’UMP en novembre dernier, une victoire lui ouvrirait les portes du congrès de son mouvement en mai prochain et il serait perçu comme le « rassembleur » lui ouvrant un boulevard pour la primaire de 2016. Ces élections départementales devaient être une hécatombe pour la gauche qui peut, au soir du premier tour, dire merci au sursaut de participation des électeurs et ainsi limiter la casse.

L’UMP en tête, le PS résiste et le FN maintien son score

Avec 31% pour le CSA, l’UMP allié presque partout à l’UDI se classe nettement en pole position. Un petit succès pour Nicolas Sarkozy. Alain Juppé a insisté sur le « désaveu de la majorité » et l’absence« de vague Bleu Marine ». Le président de l’UMP a d’ores et déjà assuré que sa formation ne conclurait « aucun accord local ou national » avec les dirigeants du FN pour le second tour. Concernant l’empoisonnante question des duels entre candidats PS et FN, Nicolas Sarkozy reste arc-bouté sur son ni-ni (ni Front National, ni front républicain), dans sa logique, c’est la même chose que « FNPS ». Mais encore faut-il que les candidats locaux UMP suivent les consignes. L’élection des présidents de conseil mettra à l’épreuve l’autorité de Nicolas Sarkozy.

Selon les dernières estimations de l’institut CSA, le score des socialistes frise la barre des 20% des voix à 19,7%. En additionnant les scores du Front de gauche et de ses alliés (9,7%) et ceux des autres candidats de gauche (7,7%), le total des voix de gauche atteint 37,1%, ce qui est honorable pour une élection intermédiaire qui, traditionnellement est toujours difficile pour le parti au pouvoir. Manuel Valls avait fait campagne en véritable chef de majorité pour se positionner en vue de 2022, il a vu dans ce résultat de quoi valider sa stratégie de campagne, lui qui était monté en première ligne contre le FN avec sa « peur » du parti des Le Pen. Dès 20 heures le locataire de Matignon s’est « félicité » : « les formations républicaines ont tenu leur place, l’extrême droite, même si elle est haute, n’est pas première formation politique de France. » Le PS peut espérer une petite embellie entre ces deux tours, avec l’annonce dans le courant de la semaine des chiffres du chômage de février.

Les derniers sondages donnaient le FN et l’UMP au coude à coude, le parti de Marine Le Pen semble arriver au soir de ce premier tour, second avec de 23 à 26% des voix, un mouvement politique qui a su, pour ces élections, tisser un réseau de candidats, lui qui encore quelques années auparavant avait du mal à trouver des candidats. Marine Le Pen, depuis son QG, a applaudi ces résultats en parlant « d’exploit ». Lors de son allocution, la présidente du Front nationale s’en est pris à Manuel Valls, qu’elle accuse d’avoir organisé « une campagne ordurière et violente » en« stigmatisant des millions d’électeurs FN ». Un FN qui pourrait jouer les arbitres lors du 3ème tour, avec l’élection des présidents.