Cette droite qui rallie Macron

Alors que le président des Républicains (LR) vient de se séparer de la vice-présidente de son parti, d’autres personnalités appartenant à l’ex-UMP font part de leurs critiques vis-à-vis de la stratégie défendue par Laurent Wauquiez. Parmi eux, Jean-Pierre Raffarin, Valérie Pecresse ou encore Alain Juppé qui semblent préparer leur ralliement à Emmanuel Macron d’ici les élections européennes. Nervous Breakdown à droite ?

Début mai, Valérie Pécresse avait sévèrement critiqué dans Les Echos Laurent Wauquiez et sa proposition de «cercles concentriques» au sein de l’Union, assurant qu’ils «fractureraient l’Europe au lieu de la renforcer». Quelques jours auparavant, Alain Juppé s’était dit plusieurs fois « pas à l’aise dans l’orientation prise par les Républicains », glissant mi-mars sur le plateau de Public Sénat qu’il se reconnaissait en revanche « assez bien dans le discours [sur l’Europe] que le président de la République a prononcé à la Sorbonne » plutôt que dans celui de Laurent Wauquiez. Quant à Jean-Pierre Raffarin, il a conditionné son maintien au sein de LR à la ligne du parti choisie pour les européennes, estimant début mai sur Europe 1, vouloir «peser dans ce choix de ligne dans sa famille politique» et ne pas «enfermer le parti des Républicains dans une logique trop droitière». Enfin, dans une tribune publiée dimanche dernier par le JDD – «Europe : continuons d’avancer» – Alain Juppé a dessiné les contours du large rassemblement espéré par… le Président de la République. Preuve que, sonnés par les résultats de la présidentielle et la défaite de François Fillon, les Républicains continuent leur division et risquent bien de fournir à la République En Marche de nouvelles personnalités issues de la droite et du centre.

Une “déliquescence” sans fin du parti ?

Il faut dire que président des Républicains n’a pas vraiment la cote auprès des sympathisants de la droite. Un sondage BVA pour Orange, RTL et La Tribune vient en effet de révéler que Laurent Wauquiez arrive désormais à la 4ème place ex-æquo avec le président de Debout la France, Nicolas Dupont-Aignan. A la tête du classement se trouvent l’ancien ministre François Baroin (58%) et le ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer (56%). Quant à Marion Maréchal, l’ancienne benjamine de l’assemblée nationale arrive désormais à la 3e position. En effet, 55% des sympathisants de droite déclarent vouloir qu’elle ait “davantage d’influence” dans la vie politique française… Et alors que Les Républicains vont de crise en crise depuis des mois, toujours KO debout après leurs échecs à la présidentielle qualifiée à l’époque « d’imperdable », pris en tenaille entre le Rassemblement National (ex-FN) et la République En Marche, ils ne parviennent pas à imprimer dans l’opinion. Signe que les temps sont graves, avant de signer une tribune pro-Macron, Alain Juppé était avec Nicolas Sarkozy sortis de son silence pour appeler avec l’ancien chef de l’Etat au « rassemblement » de la famille. Récemment, même Jean-François Copé y a été de son couplet pour le moins critique :

« Laurent Wauquiez nous tue à petit feu. Il est en train de réduire le parti à une ligne antieuropéenne et radicale. Ce n’est plus la ligne d’un parti de gouvernement (Jean-François Copé, 18/06/2018 ; sources : Le Parisien) »

Il faut dire que le 18 avril dernier (un an après la présidentielle), une étude IFOP parue dans Paris Match a rejoué l’élection de 2017 avec Laurent Wauquiez en lieu et place de François Fillon, qui avait obtenu 20,01% il y a 15 mois. Dans ce sondage, le patron de LR n’obtennait plus que 8% au premier tour, loin derrière Emmanuel Macron (36%), Marine Le Pen (23%) et Jean-Luc Mélenchon (16,5%)… Mais, selon les observateurs, ce ne serait pas qu’un simple problème de personnalité. En un an, les députés LR se sont en effet retrouvés à voter ou à s’abstenir sur plusieurs textes de loi du gouvernement, comme la réforme du Code du travail ou la loi asile-immigration. Il y aurait en fait au sein des LR un problème de logiciel : comment incarner l’opposition alors qu’en fait, Emmanuel Macron fait ce que la droite disait vouloir faire et qu’elle n’a pas fait quand elle était au pouvoir ? Pour certains, cela explique pourquoi Laurent Wauquiez n’aurait pas le choix et opterait maintenant pour une ligne plus radicale. Le patron de LR suivrait ainsi le choix effectué à la fin des années 80 par le RPR, alors à la peine. Jacques Chirac, Alain Juppé et Philippe Seguin avaient alors opté pour une ligne très dure sur l’immigration avant d’y renoncer totalement en 1995 en privilégiant la “fracture sociale”.

En Calédonie, les Républicains circonspects

Si deux mouvements calédoniens sont toujours apparentés officiellement à l’ex-UMP au niveau national (le Rassemblement-Les Républicains et le MPC), sur le plan local, les personnalités de la droite se sont profondément divisées (comme en métropole) lors des primaires de la droite et du centre. Certains choisissant alors de soutenir Alain Juppé, quand d’autres restaient fidèles à Nicolas Sarkozy. Les deux hommes n’ayant pas remporté les suffrages des militants de la droite, c’est bon an mal an (et parfois sans entrain) que les mouvements non-indépendantistes ont soutenu du bout des lèvres le candidat de leur famille politique lors de la présidentielle. Un an après, le malaise reste toujours perceptible dans les rangs des LR, Pierre Frogier déclarant il y a quelques jours qu’il se sentait « un peu triste pour (sa) famille politique » et qu’il était selon lui « nécessaire de redonner un sens à l’équipe dirigeante des Républicains à Paris ». Car à l’instar d’un certain nombre d’élus issus de Calédonie Ensemble ou des Républicains Calédoniens, plusieurs personnalités politiques locales appartenant à la droite non-indépendantiste ont fait savoir après la visite d’Emmanuel Macron sur le territoire leur désir de rejoindre la République En Marche. Pour l’heure, seul Gil Brial – 2nd vice-président de la province Sud – a souhaité s’afficher avec Laurent Wauquiez, démontrant par là son retour dans le giron de l’ex-RPCR qu’il avait quitté avec d’autres il y a quelques années.